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Origine du nom

L’origine du nom "Népal" n’est pas très sûre. Il existe deux thèses :

·         Certains pensent que le mot "Népal" dériverait du sanskrit "nipalaya", qui signifie "lieu situé au pied" [sous-entendu des montagnes], en raison du fait que le pays est au pied de l'Himalaya.

·         D’autres suggèrent que ce mot viendrait du tibétain "niyampal" qui signifie "terre sacrée".

 

Histoire ancienne

Depuis la nuit des temps, le Népal est le melting-pot de deux types de populations très différents. Sur le plan ethnique, certains Népalais ressemblent à des Tibétains, tandis que d’autres ressemblent à des Indiens. Sur le plan linguistiques, certains idiomes sont d’origine sino-tibétaines, tandis que d’autres sont d’origine indo-européenne et s’apparentent au sanskrit.

L’histoire attestée du Népal commence avec les Kirati, une population de type mongol venue de l’est qui s’est installée au Népal vers le viie ou viiie siècle avant notre ère. C’est à l’époque des Kirati que le bouddhisme s’est introduit au Népal. Pour le reste, on sait très peu de choses d’eux. Deux ethnies de l’est du Népal, les Rai et les Limbu, seraient les descendants actuels des Kirati.

Vers l’an 300 de notre ère, un peuple indo-aryen, les Licchavi, a envahi le nord de l’Inde et renversé le dernier roi Kirati. Sous leur influence, le bouddhisme a décliné et l’hindouisme a prospéré. Il est encore largement majoritaire de nos jours. Les Licchavi ont introduit au Népal le système des castes qui perdure encore de nos jours. Ils nous ont également laissé des merveilles architecturales.

De l’an 600 à l’an 1200, c’est la dynastie Thakuri qui domine. Du début du xiiie siècle à la moitié du xviiie siècle, c’est la dynastie Malla qui règne sur toute la région de Katmandou. Les Malla ont inauguré une période riche et florissante pour toute la vallée. Ils ont construit de superbes monuments encore visibles aujourd’hui. Ils étaient hindouistes mais très tolérants vis-à-vis du bouddhisme, ce qui permit au tantrisme himalayen de s’épanouir.

Sous les Malla, le Népal se subdivisa en de nombreuses cités-États, souvent en conflit. Il y eut jusqu’à 46 États distincts, chacun battant monnaie et entretenant une armée permanente. Au xve siècle, les trois grandes villes de la vallée, Katmandou, Bhaktapur et Patan, étaient à l’époque des royaumes indépendants et rivaux. C’était à qui bâtirait les plus beaux temples et créerait les plus belles œuvres d’art. Katmandou s’appelait alors Kantipur, Bhaktapur s’appelait Bhadgaon (la ville des dévôts) et Patan était parfois appelée Lalitpur (ville de beauté).

 

Les Ghorkas et la naissance du Népal moderne

L’histoire moderne du Népal commence en 1769, date à laquelle le chef de la petite principauté de Gorkha, Prithivî Nârâyan Shâh, soumet un certain nombre d'États indépendants des contreforts de l'Himalaya et monte sur le trône de ce qu’on appela par la suite le royaume Gorkha. C’est lui qui met fin à l’indépendance des trois grandes villes de la vallée, Katmandou, Bhaktapur et Patan. Son royaume, complètement fermé aux étrangers, constitue l’embryon du Népal moderne.

Il faut dire quelques mots des Gorkhas, parce que paradoxalement, ces fondateurs du Népal moderne ne sont pas du tout originaires de cette région, ils viennent du Rajasthan. Au départ, ce sont des membres d’un clan Rajput, le clan Khasi, qui ont émigré de l’Inde du Nord vers le territoire actuel du Népal au xvie siècle, chassés par les musulmans.

Petit rappel sur les Rajputs : ce mot désigne à la fois un peuple et une certaine aristocratie. Il signifie littéralement "fils de prince" (de "râja", prince, et "putra", fils). Les Rajputs forment la majorité des habitants du Rajasthan (appelé autrefois "Râjputâna") et une partie de celle du Gujarat. La majeure partie des Rajputs appartient à la caste des Kshatriyas, souvent décrite comme la caste des guerriers. Pour être plus précis, le mot sanskrit "kshatra" signifie "domination, pouvoir, gouvernement". Il renvoie aux notions de seigneur, de noble ou de chef de guerre. Cette origine Rajpute des Gorkhas aura beaucoup d’influence sur leur histoire et, comme on le verra, elle en a encore aujourd’hui.

kukriComme c’est le cas chez beaucoup de peuples, les Gorkhas ont une légende fondatrice. Au viiie siècle, le jeune prince Bappa Rawal, fondateur de la dynastie de Mewar, serait tombé sur le saint guerrier Gurû Gorkhanath en profonde méditation alors qu’il chassait avec des amis dans les jungles du Rajasthan. Il décide alors de rester auprès du saint et de le protéger durant sa méditation. Lorsque celui-ci revient au monde, touché par la dévotion du prince, il lui offre la dague Kukri et lui dit que, dorénavant, lui et ses hommes seront connus dans le monde entier pour leur bravoure. Il les nomme "Gurkhas", c'est-à-dire disciples de Gorkhanath, et leur donne comme mission de stopper l'avance des envahisseurs musulmans. Il faut dire que les musulmans sont en train de s'emparer de l'Inde blanche (c'est-à-dire d’un pays appelé Qandahār correspondant à peu près à l'Afghanistan actuel) qui est à l’époque un royaume hindouiste et bouddhiste. Comme on le verra un peu plus bas, ce terme "Gurkha" aura une fortune considérable.

En 1559, quelques-uns des Gurkhas, descendants de Bappa Rawal, et conduit par leur chef Dravya Shâh émigrent vers l'est et se découpent un petit royaume sur le territoire du Népal actuel, à peu près à mi-chemin entre Katmandou et Pokhara. Ils donnent à ce territoire le nom de Gorkha en l'honneur de leur saint patron. Dans le Népal d’aujourd’hui, ce territoire s’appelle encore le "district de Gorkha".

En 1769, sous la conduite du maharaja Prithivî Nârâyan Shâh qui règne jusqu'en 1775, ils s'emparent de la majorité du territoire actuel du Népal, alors dirigé par les Malla, et s'installent à Katmandou où ils font de l'hindouisme la religion d'État.

En 1788, puis en 1791, les Gurkhas envahissent le Tibet et pillent le monastère de Tashilhunpo à Shigatse. En 1792, ironie de l’Histoire, c’est à la Chine que le Tibet demande de l'aide pour se défaire des envahisseurs Gorkhas.

 

L’héritage des Gorkhas

L’influence des Gorkhas sur le Népal est évidemment énorme, ne serait-ce que sur le plan linguistique. Leur langue, le gurkhalî, un dialecte indo-européen proche de l’hindî, est devenue la langue commune du Népal. Elle est aujourd’hui connue sous le nom de népalî ou népalais.

D’autre part, le terme "Gurkha" sera employé pendant des siècles pour désigner un corps d’élite qui perdra une guerre contre l’Angleterre en 1816, puis combattra aux côtés de l’Inde et sera, de ce fait, intégré à l’armée britannique. Aujourd’hui encore, les Gurkhas, loin d’être considérés comme des mercenaires par la Grande-Bretagne, sont constitués en brigade au sein de l’armée britannique et sont donc soumis aux lois et règlements qui régissent tout soldat britannique. Un système équivalent régit les Gurkhas qui servent dans l'armée indienne. Les Gurkhas de l’armée britannique ont participé à toutes les guerres de l’Empire, de la révolte des Cipayes de 1857-1858 à la Guerre des Malouines de 1982 en passant par les Guerres mondiales et les conflits coloniaux.

La révolte des Cipayes est un épisode très violent et assez curieux de l’histoire de l’Empire des Indes. En mars 1857, le bruit court que la graisse utilisée pour les nouvelles cartouches est tirée de graisses animales (de vaches selon les uns, de porcs selon les autres). Or, ces cartouches doivent être déchirées avec les dents pour être décapsulées avant emploi, ce qui scandalise les mercenaires locaux (les fameux "Cipayes"), aussi bien les hindous qui vénèrent les vaches que les musulmans qui ne supportent aucun le contact avec le porc. Le 10 mai 1857, 85 Cipayes, qui ont refusé d'utiliser lesdites cartouches, sont condamnés à dix ans de travaux forcés. Le lendemain, la révolte gagne le régiment qui se mutine, marche sur Delhi et la conquiert sans même combattre. Dans la foulée, ils prennent la ville de Lucknow. La panique gagne Bombay, Madras et Londres. Mais la vieille politique britannique, "diviser pour régner", porte ses fruits : les Sikhs du Pendjab n'ont guère de sympathie pour l'empereur moghol de Delhi, et les hindous du sud de la péninsule préfèrent attendre avant de choisir leur camp. Delhi est reconquise par les troupes Britanniques avec l’aide des Gurkhas en septembre 1857. L'empereur est arrêté et ses trois fils sommairement exécutés. En mars 1858, les Britanniques se rendent à nouveau maîtres de Lucknow.

Petite remarque linguistique : à la suite de l'indépendance de l’Inde, les Gurkhas ont été renommés Gorkhas, mais l’habitude d’utiliser le mot "Gurkha" est tenace.

Devenir Ghorka est un rêve très répandu chez les jeunes Népalais. La brigade des Gorkhas est un corps prestigieux qui promet une vie d’aventures et de voyages et offre une solde bien plus élevée que les plus hauts salaires népalais. Des recruteurs, généralement d’anciens Gorkhas à la retraite, parcourent les campagnes et sélectionnent les candidats sur des critères physiques (tractions, pompes, endurances à la course, etc.). Les candidats retenus doivent ensuite passer un examen de culture générale en anglais et c’est souvent là que le bât blesse car le niveau des écoles publiques est très faible.

 

xixe siècle : une autocratie dans un pays fermé

Après 1800, les héritiers de Prithivî Nârâyan Shâh se révèlent incapables de contrôler politiquement le Népal et le pays sombre dans une période d'agitation et d’instabilité. De plus, en 1814, un conflit oppose le Népal à la compagnie anglaise des Indes orientales, ce qui provoque une guerre anglo-népalaise connue sous le nom de guerre des Gurkhas. Elle se termine en 1816 par la défaite du Népal.

En 1846, le premier ministre Rânâ décide de reprendre les choses en main d’une manière musclée. Il centralise tous les pouvoirs et ne laisse au souverain que le rôle très accessoire d’inaugurer les chrysanthèmes, pour reprendre la petite phrase de De Gaulle. Pour faire bonne mesure, il décrète que dorénavant, le poste de Premier ministre sera héréditaire. Ce coup de force rappelle un peu celui des maires du palais, à l’époque où Pépin le Bref obtient du pape le sacre royal et fonde la dynastie carolingienne. Au Népal, la nouvelle dynastie, c’est celle de la famille Rânâ. Après avoir mis en place un régime autoritaire, fortement centralisé et passablement xénophobe, elle mène une politique isolationniste qui coupe le Népal de toute influence extérieure et lui donnera pour longtemps une réputation de "pays inaccessible". Ce n’est pas l’Himalaya qui est à l’origine de cette réputation, c’est l’administration Rânâ.

Ce splendide isolement perdurera jusqu’en 1951, date à laquelle le Népal décide de s'ouvrir au monde extérieur et d’accueillir ses premiers visiteurs. Les choses vont presque trop loin dans l’autre sens, car une quinzaine d’années plus tard, des hordes de hippies débarquent des États-Unis et d'Europe, contribuant à faire de Katmandou une légende et à donner au Népal la renommée d’un paradis où le haschich est en vente libre. Aujourd’hui, la réputation d’inaccessibilité du Népal est un vieux souvenir et la période hippie est révolue. Le Népal est devenu une destination où abondent les touristes et les trekkeurs de toutes nationalités, bien que l’infrastructure hôtelière et routière soit loin d’être à la hauteur de l’intérêt que suscite ce superbe pays.

 

Le roi Tribhuvan et sa lutte contre la famille Rânâ

TribhuvanLe roi Tribhuvan est un descendant direct de Prithivî Nârâyan Shâh. Il est roi du Népal de 1911 à 1950 et de 1951 à sa mort en 1955. Son principal objectif est de mettre un terme à l'hégémonie que la famille Rânâ exerce sur le pouvoir depuis 150 ans. Il est démis de ses fonctions le 6 novembre 1950. Cinq jours plus tard, il rejoint l'Inde qui vient d’acquérir son indépendance. Avec l'aide de Jawaharlal Nehru – le fameux Pandit Nehru qui fut l'une des figures de proue de la lutte pour l'indépendance de l'Inde – il revient au pouvoir dès le début de l'année 1951. Le 16 novembre 1951, il parvient à nommer un Premier ministre qui n’appartient pas à la famille Rânâ : Matrika Prasad Koirala. Pendant les années 1950, un projet de constitution est rédigé, instituant une démocratie représentative inspirée du modèle britannique. Tribhuvan meurt en mars 1955 à l'hôpital de canton de Zurich.

Le roi Tribhuvan et son combat victorieux contre la dynastie Rânâ semblent avoir laissé un bon souvenir aux Népalais car ils ont donné son nom à l’aéroport de Katmandou et à la plus grande université du Népal.

Le Tribhuvan International Airport est le seul aéroport international du Népal. Il est situé à environ six kilomètres du centre de Katmandou.

La Tribhuvan University est une université publique située à Kirtipur, dans la banlieue de Katmandou. Fondée en 1959, la Tribhuvan University est la plus vieille des douze universités du Népal. Elle accueille près de 300 000 étudiants népalais ou étrangers. C’est l’université la plus importante du Népal et la 9e plus grande du monde.

 

Le roi Mahendra et son mépris pour la démocratie parlementaire

MahendraC’est le fils du roi Tribhuvan, Mahendra, qui lui succède après sa mort.

Au début de 1959, il promulgue la nouvelle constitution, et les premières élections législatives démocratiques sont organisées. Le parti du congrès népalais, un parti socialiste modéré, remporte largement les élections. Son chef, Bishweshwar Prasad Koirala (le frère de Matrika Prasad Koirala) forme son gouvernement et devient Premier ministre.

Mais 18 mois plus tard, le roi Mahendra, qui est très loin d’être aussi démocrate que son père, décrète l'échec de la démocratie parlementaire, démet le gouvernement de Koirala et promulgue une nouvelle constitution qui prend effet le 16 décembre 1962.

Celle-ci interdit tout parti d'opposition et instaure le système des panchayat (ou conseils) que Mahendra présente comme une forme démocratique de gouvernement plus proche des traditions népalaises. Il s’agit d’une structure pyramidale qui part des villages pour remonter vers le parlement national, appelé "Rastriya Panchayat", puis vers le roi. Ce système consacre la monarchie absolue et installe le roi à la tête de l'État avec une autorité illimitée sur toutes les instances gouvernementales, y compris le "Cabinet" (c’est-à-dire le conseil des ministres) et le Parlement.

 

Le roi Birendra et ses penchants dictatoriaux

BirendraLorsque le roi Mahendra meurt en 1972, c’est son fils Birendra qui lui succède à l’âge de 27 ans.

Bien qu’il ait fait ses études à Eton et à Harvard, ce n’est pas un esprit progressiste. Le système politique en vigueur lui paraît tout à fait adapté au pays, ce qui est évidemment loin d’être l’avis de tout le monde. Au fil des années, la lenteur du développement, la corruption des fonctionnaires et la hausse du coût de la vie attisent le mécontentement populaire. Finalement, de violentes manifestations estudiantines et antigouvernementales éclatent en 1979. Sous la pression de la rue, le roi Birendra organise un référendum national pour décider de la nature du futur gouvernement du Népal. Les deux options soumises au vote sont :

soit la conservation du système des panchayat amélioré par des réformes démocratiques
- soit l'établissement du multipartisme.

Le référendum a lieu en mai 1980. Les résultats sont très serrés, mais contrairement à qu’on aurait pu imaginer, c’est le système des panchayat qui l’emporte. Le roi institue les réformes promises, y compris celle du choix du Premier ministre par le Rastriya Panchayat.

En théorie, le système des panchayat contient tout ce qu’il faut d’ingrédients démocratiques. Il autorise le suffrage universel et le vote à bulletin secret, la Constitution garantit la liberté d’expression, la liberté de rassemblement pacifique et le droit de créer des associations et des syndicats.

La réalité est beaucoup moins rose. Il est interdit aux associations et aux syndicats de faire état de la moindre "motivation politique", restriction ambigüe s’il en est. La police et l’armée n’ont aucun compte à rendre de leurs actes. La censure est extrêmement stricte. Les arrestations sont innombrables et les témoignages abondent sur les tortures et les sévices infligés à tous ceux qui sont suspectés de "militantisme". Décidément, l’esprit démocratique du grand-père Tribhuvan est bien oublié. Il a même dû sursauter dans sa tombe quand il a appris que le roi et ses frères s’étaient mariés à de riches héritières de la famille Rânâ qu’il avait combattue toute sa vie avec tant d’énergie.

 

Le peuple exige et obtient une monarchie constitutionnelle

Traditionnellement, les armées indiennes et népalaises entretiennent des relations étroites. Vers la fin des années 80, après la visite de plusieurs délégations chinoises au Népal, New Delhi s’est inquiétée de ce qui lui apparaissait comme un rapprochement entre le Népal et la Chine. Les stratèges militaires indiens ont toujours été hostile toute présence chinoise dans l'état himalayen. Ils étaient très opposés, par exemple, à l'idée qu'une ligne ferroviaire puisse un jour relier Lhassa à la frontière népalaise.

Or en 1989, le Népal achète des armes à la Chine sans obtenir l'accord préalable de New Delhi. La réaction de l’Inde est immédiate : elle décrète un blocus économique. Les difficultés qui en résultent provoquent un fort mécontentement au sein d’une population déjà scandalisée par la corruption éhontée du personnel politique. Sûrs d’obtenir un large soutien populaire, les groupes d’opposition décident alors de former une coalition pour mettre en place une monarchie parlementaire multipartite. C’est la naissance du Mouvement du Peuple (Jana Andolan).

La lutte est dure. En février 1990, le gouvernement répond aux manifestations non violentes par des tirs de balles réelles, des gaz lacrymogènes et d’innombrables arrestations suivies de torture. Suivent plusieurs mois de violente émeutes intermittentes, de couvre-feux et une grève qui finira par porter ses fruits. Le 9 avril, le roi Birendra annonce à la radio qu’il lève l’interdit sur les partis politiques. Le 16 avril, il demande à l’opposition de diriger un gouvernement provisoire et se déclare prêt à accepter le rôle de monarque constitutionnel. C’est une victoire chèrement acquise qui aura coûté plusieurs centaines de morts (sans doute plus de 300).

 

La guerre civile

Les habitants des zones rurales avaient eu l'espoir d'être mieux représentés après l'adoption de la démocratie parlementaire en 1990. Quand il devient évident que les réformes agraires promises n'auront pas lieu, les ruraux de certaines parties du pays vont décréter leur propre réforme pour gagner une certaine maîtrise sur leurs vies face aux propriétaires terriens. En réaction contre ce mouvement, le gouvernement népalais organise une répression féroce qui entraîne l'élimination de plusieurs des principaux activistes en lutte. Ces opérations répressives amèneront beaucoup de leurs témoins à se radicaliser.

C’est dans ce contexte que, le 12 février 1996, débute une guerre civile. Il s’agit d’une insurrection d'inspiration maoïste dont le but affiché est l’abolition de la monarchie corrompue et l’instauration d’un régime communiste fonctionnant comme une "démocratie populaire".

Menée par Pushpa Kamal Dahal (connu également sous le nom de guerre de Prachanda) et le Dr. Baburam Bhattarai, idéologue du mouvement maoïste, l'insurrection débute dans cinq districts : Rolpa, Rukum, Jajarkot, Gorkha et Sindhuli. Les maoïstes, parvenant à contrôler de larges portions du territoire népalais, surtout dans les campagnes de l’ouest du pays, annoncent la création d'un "gouvernement du peuple" temporaire afin de remplacer les bureaux locaux de l'Administration auxquels ils s'attaquent régulièrement.

Malgré leur prétention à défendre les intérêts du peuple, les maoïstes sont accusés par les organisations de défense des droits humains de s'approprier les biens appartenant à des familles paysannes, de recruter de force des enfants-soldats, d'extorquer de l'argent à des entrepreneurs, d'imposer des "taxes révolutionnaires", de procéder à des enlèvements et de s'adonner à la pratique de mauvais traitement à l'égard des personnes enlevées. Ces mêmes organisations accusent en même temps l'Armée royale de recourir à la torture et aux mauvais traitements à l'endroit des personnes « capturées » dans le cadre de leurs opérations de lutte contre la guérilla. Au total, la guerre civile fera près de 13 000 morts.

 

Massacre au palais royal

Le 1er juin 2001, le prince héritier Dipendra, ivre et sous l'emprise de la cocaïne, abat 10 membres de la famille royale au cours d'un dîner. Parmi les victimes se trouvent notamment ses parents, le roi Birendra, la reine Aiswarya ainsi que les autres enfants du couple royal. Dipendra retournera l'arme contre lui-même et mourra, après trois jours de coma. Le prince héritier aurait agi par colère, ses parents s’opposant à son mariage avec une femme d’origine indienne.

Après ce drame, Gyanendra, le frère de Birendra, absent à ce dîner, monte sur le trône. Curieusement, il avait déjà été roi pendant quelques mois pendant son enfance, de 1950 à 1951, quand Tribhuvan, Mahendra et Birendra ont fui le pays pour échapper à la famille Rânâ. Il est très impopulaire et son couronnement est loin de soulever l’enthousiasme de la population.

Bouleversés par ce drame, de nombreux Népalais manifestent aux portes du palais contre le gouvernement et réclament plus d’information sur les événements du 1er juin. Sous le manteau, on parle d’une conspiration ourdie par Gyanendra et le premier ministre Koirala. Pour faire taire ces rumeurs, le nouveau souverain forme immédiatement une commission d’enquête. Elle fournit un rapport qui conclut à la responsabilité du prince héritier, mais pouvait-elle faire autrement ? Aujourd’hui encore, nombreux sont les Népalais qui croient plutôt à l'implication de Gyanendra et de son fils Paras dans le massacre de la famille royale.

 

Gyanendra ou le retour de la dictature

GyanendraEn octobre 2002, le roi Gyanendra se met toute la classe politique à dos en suspendant le Parlement, les Conseils locaux et en démettant de ses fonctions le Premier ministre Sher Bahadur Deuba au motif de son incapacité à régler le problème des insurgés maoïstes. Il n'y avait donc plus de pouvoir élu.

En juin 2004, le roi nomme à nouveau Sher Bahadur Deuba Premier ministre, le limoge une seconde fois huit mois plus tard et l'assigne à résidence. Gyanendra s'arroge alors les pleins pouvoirs et forme un nouveau Conseil des ministres composés de fidèles qu'il choisit lui-même. Ce nouveau gouvernement est supposé lutter efficacement contre la rébellion maoïste et la corruption. Il décrète l'état d'urgence pour les trois ans à venir et suspend les droits fondamentaux. Les médias sont muselés tandis que des centaines de personnes sont arrêtées.

En avril 2005, le roi Gyanendra promet des élections municipales dans un délai d'un an. Malgré les demandes des organisations non-gouvernementales, il refuse cependant la tenue d'élections législatives. Les partis politiques népalais se rallient donc sous un mot d'ordre commun : la restauration du Parlement dissous en 2002.

Le 6 avril 2006, les partis d'opposition déclenchent, une grève générale illimitée destinée à faire plier le souverain. Ils réclament notamment la convocation d'une assemblée constituante. Les plus radicaux d'entre eux n'hésitent pas à prôner l'instauration d'une république. Le 24 avril 2006, face à la pression de la rue, le roi accepte finalement de restaurer l'assemblée dissoute en 2002 et nomme Premier Ministre Girija Prasad Koirala, le troisième frère de Bishweshwar Prasad Koirala et de Matrika Prasad Koirala. Lors de son investiture, le nouveau premier ministre annonce devant les parlementaires, et avec l'accord unanime des partis d'opposition, son intention d'organiser des élections en vue former une assemblée constituante qui décidera notamment du sort de la monarchie.

Le 18 mai 2006, le Parlement vote à l’unanimité une proclamation privant le roi Gyanendra de l’essentiel de ses pouvoirs. Cette proclamation stipule que le Parlement est l’autorité suprême du pays. Le nom officiel du pays est changé. On ne parle plus de "Royaume du Népal" mais d’ "État du Népal" et l’appellation "Gouvernement du Népal de Sa Majesté" est changée en "Gouvernement du Népal". Le Premier Ministre devient officiellement le chef du pouvoir exécutif. Le roi n'a plus qu'un rôle honorifique. Il perd son titre de Commandant suprême de l’Armée royale népalaise et l’armée, rebaptisée Armée du Népal, passe sous contrôle d’un Conseil national de sécurité présidé par le Premier ministre. En vertu de cette proclamation, tous les pouvoirs exécutifs de l’État sont désormais assumés par le Conseil des ministres. En outre, le Népal, seule nation officiellement hindoue au monde, devient un État laïque. Le "Raj Parishad" ou Conseil royal est aboli. Le roi pourra désormais être poursuivi devant les tribunaux comme n'importe quel citoyen et il sera tenu de payer ses impôts comme tout le monde.

 

Naissance de la république népalaise

Le 21 novembre 2006, un accord de paix est signé entre le gouvernement et le Parti communiste du Népal (maoïste) (ex-rebelles maoïstes). Le gouvernement et les maoïstes s'entendent pour donner autorité à l'ONU de superviser le contrôle des armes et pour coordonner leurs efforts dans la préparation de l’élection des membres d’une Assemblée constituante.

Le 1er avril 2007, bien que la paix soit fragile et que les ex-rebelles maoïstes contreviennent souvent au code de conduite signé par les deux parties, un nouveau Gouvernement provisoire est constitué. Ce gouvernement de coalition, dirigé par le Premier ministre Girija Prasad Koirala, comprend cinq ministres maoïstes. Le nouveau gouvernement décide de la tenue d’élections pour la formation d’une l'Assemblée constituante.

Le 18 septembre 2007, les maoïstes claquent la porte du gouvernement parce que les partis modérés refusent d'accélérer la destitution du roi et de proclamer une république.

Le 28 décembre 2007, après moult tractations, un accord est trouvé entre les différentes composantes politiques du pays : l'élection d'une assemblée chargée de rédiger une nouvelle Constitution est prévue pour le 10 avril 2008 et le Parlement provisoire approuve à une écrasante majorité une résolution prévoyant l'abolition de la monarchie après cette élection. Dans ces conditions, les maoïstes acceptent de reprendre leur place au gouvernement.

Le 10 avril 2008, les maoïstes sortent vainqueurs de l'élection de l’assemblée constituante.

Le 28 mai 2008, lors de sa séance inaugurale, l’assemblée constituante confirme l'abolition de la monarchie et son remplacement par une "république démocratique fédérale".

 

L’accouchement interminable de l’assemblée constituante

L’assemblée constituante n’en finit plus de constituer. Elle aurait dû remettre son texte en été 2010, mais l'échéance a été repoussée pour la quatrième fois le 29 novembre 2011. Début 2012 la Cour Suprême népalaise a refusé un délai supplémentaire. Le délai de 3 ans étant largement révolu, l'Assemblée Constituante est de fait dissoute  

L’une des causes de ce retard est peut-être que dans un Népal miné par une corruption généralisée, les membres de l’assemblée constituante n'étaient pas pressés de renoncer aux privilèges que leur confère leur fonction. Mais il faut quand même reconnaître que certains problèmes du Népal sont un réel casse-tête. Ce n’est qu’à la fin de l’année 2011 que Baburam Bhattarai, l'idéologue maoïste devenu Premier ministre depuis août 2011, a réussi après des années de disputes internes à obtenir satisfaction sur le sort de 17 000 ex-combattants maoïstes de l'Armée de libération du peuple (PLA), entretenus à grands frais dans des camps depuis le cessez-le-feu de 2006. 9 690 combattants devraient être réintégrés dans l'armée régulière et 7 286 autres se "retirer".

Parmi les problèmes épineux, citons le traitement accordé à certains cadres maoïstes accusés de crimes durant la guerre, ou encore les litiges fonciers à la suite des redistributions de terres organisées autrefois par les guérilléros en faveur des paysans pauvres.

Début 2013 le Gouvernement présidé par Baburam Bhattaraï n' donc plus de parlement ni aucune légitimité. L'élection d'une nouvelle assemblée est envisagée pour le mois de mai mais qui peut prédire qu'elles auront bien lieu ?

 

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